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Le COVID-19 réduit encore plus les possibilités de scolarisation des élèves autistes en Europe

Les mesures introduites dans le cadre de la propagation du COVID-19 ont eu un impact majeur sur les possibilités de scolarisation des élèves autistes dans toute l’Europe. Les apprenants autistes ont souvent besoin d’une planification et d’un soutien individualisés qui tiennent compte de leur situation ainsi que de leur niveau de développement et de scolarité.

Autisme-Europe a recueilli des exemples auprès de ses organisations membres sur la manière dont la rentrée scolaire s’organise dans les différents pays et régions d’Europe, sur les principaux défis et sur les mesures spécifiques adoptées par les gouvernements en matière d’éducation inclusive. Ce bilan montre qu’il est impératif que les ressources allouées au soutien des enfants autistes ne soient pas détournées vers des mesures préventives contre le COVID-19, et que les besoins éducatifs des apprenants autistes soient adéquatement pris en compte pendant cette crise de santé publique, quel que soit leur type de scolarité. En effet, jusqu’à présent, leur scolarité a été largement affectée.

Irlande : les enfants autistes auront besoin de plus de soutien à la rentrée des classes

Les parents d’enfants autistes qui doivent retourner à l’école en septembre s’inquiètent sérieusement de savoir si le soutien qui leur sera offert sera suffisant, selon une enquête menée par l’AsIAm auprès de 1 186 parents. Les parents interrogés ont indiqué que de nombreux jeunes avaient trouvé très difficile de gérer leur niveau de stress et de continuer à apprendre depuis la fermeture des écoles en mars.

 « Lorsqu’ils retourneront à l’école, ils auront besoin du soutien d’assistants formés à l’accompagnement des apprenants­­­­­­ en situation de handicap et, dans certains cas, d’heures d’enseignement supplémentaires et de classes spéciales pour l’autisme », a expliqué Adam Harris, fondateur et directeur d’AsIAm. « Les règles de sécurité accroîtront les besoins de soutien de beaucoup d’enfants autistes, alors même que les ressources seront soumises à une pression sans précédent, il est vital que le ministère de l’éducation le reconnaisse ».

France : le combat continue

La crise sanitaire a révélé de nombreux dysfonctionnements et injustices préexistants à l’égard des élèves handicapés en France. Pour la deuxième année consécutive, l’Unapei, en collaboration avec Autisme France, Sésame Autisme et d’autres organisations, mène une campagne pour mettre en évidence l’échec actuel à faire respecter le droit à l’éducation des enfants handicapés en France. Ces organisations appellent toutes les familles concernées à témoigner sur le site de la campagne « #Jaipasecole » pour faire part des difficultés qu’elles rencontrent dans l’accès à l’éducation. Elles proposent quatre axes d’action concrets afin de rendre l’école plus accessible à tous, soutenir les familles sans discontinuité et optimiser les relations entre l’éducation nationale et les professionnels de toute la communauté médico-sociale.

 « En juillet dernier, le ministère de l’éducation a mené une enquête auprès des enseignants, des familles et des élèves. Celui-ci dresse un bilan positif de la continuité éducative mise en place pendant la période de confinement. Il est regrettable que les familles avec des enfants handicapés n’aient pas été consultées car pour ces dernières, la crise sanitaire a aggravé les conditions de scolarisation déjà difficiles, entraînant la perte d’opportunités, la fatigue, l’isolement, la lassitude, etc. Leur combat continue », a déclaré le président de l’Unapei, Luc Gateau.

Ecosse : Appel à des plans de transition

Le confinement a été extrêmement difficile pour de nombreuses familles avec des enfants autistes dans toute l’Europe. L’énorme changement dans la routine et la vie quotidienne, ainsi que les restrictions strictes liées au confinement, ont provoqué la détresse de nombreux enfants autistes et soumis les familles à une pression immense, dont la plupart n’avaient que peu de soutien.

Avant d’entamer la nouvelle année scolaire, la National Autistic Society Scotland a demandé aux écoles de fournir à tous les enfants autistes un programme de transition personnalisé pour les aider à retourner à l’école en août.

Selon le gouvernement écossais, l’Ecosse compte 6 500 enfants autistes. Un tiers des enfants autistes a également un trouble de l’apprentissage et, dans de nombreux cas, des difficultés de santé mentale.

Nick Ward, directeur de la NAS Scotland, a déclaré : « Au début du nouveau trimestre, de nombreux enfants autistes n’auront pas été scolarisés pendant plus de 4 mois. Certains s’en sont très bien sortis. D’autres, en revanche, ont dû faire face à des restrictions strictes et à un énorme changement de routine. Certaines familles ont été soumises à une forte pression qui a eu de profondes répercussions sur leur santé mentale et leur bien-être ».

Autres ressources du Royaume-Uni

NAS- Coronavirus: education and school

COVID-19 Information Centre- Autism Education Trust

COVID 19 – supporting autistic learners return to education- Autism Toolbox

Northen Ireland Goverment- Latest Department of Education updates in relation to COVID-19

Welsh Government- Education and childcare: coronavirus

Espagne : Importantes lacunes organisationnelles et méthodologiques

Comme d’autres pays de l’UE, l’Espagne est régie par un modèle d’État décentralisé dans lequel l’éducation est de la responsabilité de chaque communauté autonome. Par conséquent, les problèmes peuvent varier d’une région à l’autre dans le pays.

Par exemple, dans la région de Navarre, il existe deux types de modèles éducatifs : l’enseignement ordinaire et l’enseignement spécial. L’Association navarraise de l’autisme s’inquiète de l’absence de directives sur la manière d’instruire les enfants à la maison. Pendant la période de confinement, les familles n’ont pas eu accès aux supports pédagogiques que les enfants utilisent habituellement et les écoles ont envoyé leurs programmes d’éducation individualisés sans aucune directive et sans tenir compte des difficultés que cela pose aux parents (qui, de surcroit, ne sont pas enseignants). En outre, l’association a mis en évidence la fracture numérique entre les familles.

Dans le cas où le modèle hybride d’enseignement sur site et en ligne serait mis en œuvre, il serait impératif de garantir la disponibilité des dispositifs technologiques. Un système devrait être créé pour prêter du matériel aux élèves afin de garantir l’accessibilité des différents canaux, matériels et méthodes d’évaluation ; de promouvoir des activités de loisirs en ligne qui stimulent l’interaction entre les étudiants neurotypiques et autistes, et de lutter contre la solitude et l’isolement exacerbés par la distanciation physique.

Dans le cas du Pays Basque, Gautena a déclaré que les écoles rouvriront le 7 septembre et suivront le système de bulles, qui implique l’absence d’interaction entre les classes ou les différents groupes. Or, même si cela n’a pas été dit expressément, ce système de bulles empêcherait les élèves des classes spéciales de participer à des activités d’intégration.

Dans le Sud, l’Andalousie dispose de quatre types de scolarisation : l’école ordinaire, l’école ordinaire avec un soutien dans certaines matières, les classes spéciales au sein d’une école ordinaire et l’école spéciale uniquement pour les personnes handicapées. Autismo Andalucia affirme ne pas avoir reçu d’information quant aux directives reçues pour la rentrée scolaire, donc celle-ci reprendra comme d’habitude. Il est difficile de déterminer quel sera le nombre d’élèves par classe dans les écoles ordinaires en raison de la crise sanitaire. Les enseignants craignent qu’il y ait trop d’enfants dans les classes, mais à ce jour, ils ne disposent d’aucune autre information.

Italie : aménagements raisonnables compromis

En Italie, l’éducation inclusive est la seule option de scolarisation. Pendant la période de confinement, des éducateurs devaient apporter un soutien à domicile aux élèves autistes qui avaient des difficultés à suivre les cours en ligne. Or, dans la pratique, c’était loin d’être la règle.

L’Italie s’apprête à rouvrir les écoles le 15 septembre en préparant des salles de classe plus grandes, en éloignant les pupitres les uns des autres et/ou en transférant des classes dans d’autres bâtiments afin de respecter les règles de distanciation. Les familles des élèves autistes craignent une diminution des ressources disponibles et que, par conséquent, les aménagements raisonnables tels que l’accès à des éducateurs de soutien soient affectés, ce qui entraverait leur pleine intégration.

L’A.P.R.I., membre d’Autisme-Europe de la région d’Emilie Romagne a relayé quelques directives du bureau scolaire de la région, y compris concernant les élèves handicapés qui ont des troubles spécifiques de l’apprentissage.

Allemagne : Demandes de dérogation pour le port du masque à l’école

En Allemagne, les établissements d’enseignement général et spécialisé ont repris leurs activités après les vacances d’été. Une question importante qui demeure est l’utilisation des masques dans les écoles. Après que la Rhénanie-du-Nord-Westphalie ait rendu le port du masque en classe facultatif deux semaines après la rentrée scolaire, la Bavière rendra celui-ci obligatoire dans toutes les écoles secondaires.

L’enquête menée par AsIam mentionnée ci-dessus révèle que jusqu’à 40 % des élèves ne sont pas du tout capables de porter un masque, et que 45 % d’entre eux sont capables d’en porter un moyennant un certain inconfort. À cet égard, Autismus Deutschland invite instamment les parents et les professionnels à informer les personnes autistes sur les amendes infligées en Allemagne pour le non port de masque, afin de leur éviter des coûts inutiles.

Norvège : Protéger les ressources nécessaires à l’inclusion

La Norvège ne dispose pas d’une législation spécifique pour la scolarisation des enfants autistes, mais plutôt d’une législation générale sur le handicap. L’idée sous-jacente est que tout le monde puisse être scolarisé dans les écoles ordinaires, quel que soit son handicap. Par définition, il n’existe donc aucune école spéciale en Norvège.

Etant donné que tout le monde ne peut évidemment pas tirer profit d’un enseignement dispensé dans de grandes classes, le système a prévu des unités « renforcées », c’est-à-dire des ressources pédagogiques renforcées. Si un enfant a des besoins spécifiques, les écoles sont tenues par la loi d’élaborer un programme d’éducation individuel devant être approuvé par les parents.

Le président d’Autisme-Europe, Harald Neerland, vivant en Norvège, nous fait part de son expérience : « Ma fille a participé avec sa classe ordinaire à des cours de musique, d’éducation physique et à des excursions. Elle a intégré des classes plus petites lorsque ça lui était profitable tandis qu’elle bénéficiait d’un soutien individuel pour le reste des cours. Ce système n’a pour ainsi dire pas été affecté par le confinement et la rentrée se déroule normalement. Evidemment certains enfants qui ont des besoins spéciaux doivent être séparés de leurs classes, parce qu’ils appartiennent à un groupe à risque. Le risque que nous voyons est que certains responsables scolaires utilisent cette situation comme excuse pour réduire le besoin de ressources supplémentaires ».